Premier long métrage d’Amanda Nell Eu, Tiger Stripes voit la cinéaste malaisienne s’atteler à une chronique adolescente, un motif familier qu’elle emmène en terrain insolite. Zaffan a douze ans, vit dans un petit village à la lisière de la forêt, et a l’impertinence joyeuse, rebelle solaire entraînant ses copines Farah et Mariam à sa suite. Une situation qui bascule lorsqu’elle a ses premières règles, la gamine étant aussitôt ostracisée par son entourage, tout en voyant son corps se transformer à toute vitesse, avec des effets aussi surprenants que libérateurs.
Amanda Nell Eu s’est inspirée de sa propre expérience pour livrer ce portrait tirant vers la fable d’une jeune fille confrontée aux mutations de la puberté. Infusé par le folklore local, Tiger Stripes ose un stimulant mélange des genres, récit d’apprentissage empruntant au fantastique et au body horror, en donnant une expression littérale aux transformations d’une héroïne ne tentant pas de réfréner sa sauvagerie. Non sans revêtir une dimension politique, Zaffan – épatante Zafreen Zairizal – s’y heurtant aux impératifs, religieux notamment, de la société malaisienne, frictions au coeur d’un récit d’émancipation féminine déroutant mais surtout bluffant. Soit, au-delà de son évidente modestie de moyens, une oeuvre audacieuse dont émane un grisant sentiment de liberté. Et une franche réussite, auréolée du Grand Prix de la Semaine de la Critique à Cannes.
Tiger Stripes
Drame fantastique. De Amanda Nell Eu. Avec Zafreen Zairizal, Deena Ezral, Piqa.
