Pour son passage derrière la caméra, la comédienne Céline Sallette a choisi de s’atteler à un portrait de la plasticienne Niki de Saint Phalle. La vie de l’artiste franco-américaine, la réalisatrice l’envisage sur une dizaine d’années à compter de 1952 lorsque, quittant les Etats-Unis et un environnement étouffant, Niki Matthews (Charlotte Le Bon) s’installe à Paris avec mari et enfant. Mannequin puis actrice, la jeune femme se révèle aussi angoissée qu’instable, hantée qu’elle est par les réminiscences de l’inceste que lui avait fait subir son père. Un traumatisme à l’origine d’une dépression profonde qui lui vaut d’être internée dans un asile psychiatrique, contexte improbable dans lequel elle va découvrir les vertus cathartiques de la création et de l’art. Pour s’y jeter à corps perdu, en prélude à un parcours libérateur qui la verra, au contact notamment du sculpteur suisse Jean Tinguely (Damien Bonnard), s’affranchir de carcans esthétiques, familiaux et patriarcaux, et se réinventer en Niki de Saint Phalle.
Mieux qu’un biopic classique, Niki est le récit de cette émancipation, « l’histoire avant l’histoire » comme l’explique Céline Sallette. Une perspective qui inspire à la cinéaste débutante un film porté par un esprit frondeur, s’écartant du naturalisme pour toucher à l’essence de son héroïne. Non sans transformer en atout la contrainte objective de n’avoir pu utiliser aucune de ses oeuvres, en s’attachant au geste créatif. S’il ne fait pas l’économie de l’une ou l’autre maladresse, l’essai, parcouru de belles idées de mise en scène, trouve aussi en Charlotte Le Bon l’interprète idéale, sa composition habitée illuminant cette métamorphose.
Niki
Film biographique de Céline Sallette. Avec Charlotte Le Bon, Damien Bonnard, Judith Chemla.