Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, Josef Mengele (August Diehl), « l’ange de la mort » d’Auschwitz, réussit, comme d’autres criminels nazis, à fuir l’Europe pour refaire sa vie dans la clandestinité en Amérique du Sud. L’homme se sait traqué par des enquêteurs allemands et israéliens voulant le capturer afin qu’il réponde de ses actes. Sa cavale, entamée dans le faste de raouts nostalgiques à Buenos Aires, va le conduire au Paraguay et enfin au Brésil, où il meurt en 1979 dans le dénuement et l’anonymat (il faudra attendre 1985 pour que son squelette soit identifié), sans jamais avoir été jugé ni exprimé le moindre remords; pas même face à son fils Rolf (Max Bretschneider), venu incognito lui demander des comptes dans sa retraite misérable deux ans avant sa mort.
Auteur du magistral Leto et de La femme de Tchaïkovski, Kirill Sebrennikov est un cinéaste au style volontiers ostentatoire. Cette adaptation du roman d’Olivier Guez ne fait pas exception à la règle, le cinéaste russe exilé en Allemagne filmant l’évaporation de Mengele sous la forme d’un puzzle temporel serti dans un noir et blanc léché. Une grille esthétique connaissant toutefois une rupture abrupte lorsque le réalisateur choisit d’exposer frontalement l’horreur des camps le temps d’un insert en 8mm couleurs montrant Mengele et ses séides se livrer à des atrocités sur leurs victimes. Démonstrative ,la reconstitution est éminemment dérangeante; elle n’entame pas l’intérêt ni la force d’un film crépusculaire emboîtant le pas à Mengele – étourdissant August Diehl – jusqu’au malaise pour le restituer dans sa complexité, au plus près de ce que Hannah Arendt appelait « la banalité du mal ».
La disparition de Josef Mengele
Biopic historique de Kirill Serebrennikov. Avec August Diehl, Friederike Becht, Dana Herfurth.