C’est un grand jour pour Iman (Missagh Zareh), qui vient d’être nommé juge d’instruction au tribunal révolutionnaire de Téhéran. Mais si sa femme, Najmeh (Soheila Golestani), et ses deux filles, Rezvan (Mahsa Rostami) et Sana (Setareh Maleki), se félicitent de sa promotion, ses nouvelles responsabilités ne vont pas sans contraintes. Pour les deux étudiantes en particulier, à qui leur père enjoint de surveiller leurs fréquentations et d’adopter profil bas. Moment où l’assassinat dans un commissariat de Masha Amini et le mouvement « Femme, Vie, Liberté » consécutif soulèvent les rues de Téhéran. Tandis que Rezvan et Sana soutiennent la vague de contestation qu’elles suivent sur les réseaux sociaux, leur père bascule dans la parano la plus totale suite à la disparition de son arme de service, Najmeh tentant de préserver ce qui peut l’être…
Ours d’or à Berlin en 2020 pour Le diable n’existe pas, Mohammad Rasoulof s’est érigé, depuis ses débuts, en critique virulent du régime des mollahs, ce qui lui valu d’être emprisonné à de multiples reprises avant de devoir se résoudre à l’exil. Non sans avoir tourné auparavant Les graines du figuier sauvage, plongée suffocante dans la réalité iranienne où il imbrique avec maestria dimension politique et drame familial sinueux. Pour un résultat secouant où, non content d’exposer l’absurdité du système, la répression, la corruption, l’injustice, la paranoïa,… le cinéaste montre comment elles gangrènent l’intime en profondeur. Si la radiographie de la société iranienne est implacable, Rasoulof salue aussi la révolte des femmes, le tout traduit en un magistral geste de cinéma culminant dans un final époustouflant. Mieux qu’un grand film politique, un chef-d’oeuvre.
Les graines du figuier sauvage
Drame de Mohammad Rasoulof. Avec Missagh Zareh, Mahsa Rostami, Setareh Maleki, Soheila Golestani.
