Tourné dans les zones rurales du Maharashtra, Marching in the Dark s’attache à une réalité tragique de l’Inde : le nombre affolant d’agriculteurs (plus de 400.000 ces trente dernières années) que les mauvaises récoltes et un endettement abyssal conduisent à se donner la mort. Un sombre tableau que le documentaire de Kinshuk Surjan, un cinéaste basé entre Bruxelles et Bhopal, envisage à travers le destin de Sanjivani, veuve de 28 ans et mère de deux jeunes enfants vivant avec sa belle-famille. Une femme introvertie parmi des milliers d’autres que le suicide de leur mari laisse dans une situation inextricable, à la douleur s’ajoutant les problèmes financiers et la pression imposée par une société patriarcale les invisibilisant. Mais qui va trouver la force de faire front dans l’adversité en rejoignant un groupe de parole réunissant des paysannes traversant la même épreuve, cette solidarité dans le deuil constituant un premier pas vers le retour à la vie.
Inscrivant son propos dans un environnement à la beauté désolée, Kinshuk Surjan s’empare d’une problématique complexe pour la traiter à niveau humain, s’intéressant à l’effet conjugué de règles archaïques et du libéralisme effréné sur cette petite communauté. Portant un regard empathique sur ce collectif féminin, il lui donne un visage lumineux en la personne de Sanjivani Bhure dont sa caméra suit la longue marche vers l’indépendance au plus près. Pour, après l’extraordinaire All We Imagine as Light de Payal Kapadia, apporter un éclairage sensible et inédit sur la condition des femmes en Inde. Fort.
Marching in the Dark
Documentaire de Kinshuk Surjan. Avec Sanjivani Bhure.