Too Real

Quinze ans après Mia, l’héroïne de Fish Tank, Andrea Arnold s’attèle à un nouveau portrait d’adolescente dans Bird. Elle s’appelle Bailey (Nykiya Adams, épatante révélation), affiche 12 ans, et déboule à l’écran et dans nos vies au son de Too Real, des Fontaines D.C. « Too Real », comme son quotidien précaire dans une petite ville sinistrée de bord de Tamise, au nord du Kent, où elle vit dans un squat délabré avec son demi-frère, Hunter (Jason Buda), et son père, Bug (Barry Keoghan). Ce dernier étant trop occupé, parmi divers plans foireux, à préparer son mariage avec Kayleigh (Frankie Box), sa nouvelle compagne, pour vraiment s’intéresser à elle. Et la gamine farouche de trouver une échappatoire dans un lien quasi fusionnel avec la nature environnante qu’elle filme avec son téléphone, horizon où surgit un jour Bird (Franz Rogowski), individu original et non moins solitaire avec qui s’établit une connexion…

Après Cow, fascinant documentaire consacré à une vache, Bird voit Andrea Arnold renouer avec ses fondamentaux, le film s’inscrivant limpidement dans le sillage de Fish Tank, tant par son contexte – celui d’une Angleterre déshéritée dont le marasme s’aggrave avec les années – que par sa figure centrale. Si l’on est là en terrain a priori familier, la réalisatrice de Wuthering Heights y injecte toutefois une dose de réalisme magique inattendue, manière d’ouvrir de nouvelles perspectives à son cinéma comme à ses personnages. Habitée par des comédiens d’une formidable justesse, portée par une mise en scène et une énergie viscérales, la chronique sociale y gagne des accents poétiques, en plus de vibrer d’un irrésistible élan de liberté. Généreux et fort.

Bird

Drame de Andrea Arnold. Avec Nykiya Adams, Franz Rogowski, Barry Keoghan