Dérive d’un fils, désarroi d’un père

Benjamin Voisin et Stefan Crepon.

Elevant seul ses deux fils depuis la disparition de leur mère, Pierre (Vincent Lindon) n’en croit pas ses oreilles lorsqu’un de ses collègues cheminot lui annonce avoir vu l’aîné traîner avec une bande d’ultras d’extrême droite dans leur petite ville de Lorraine. La stupeur passée, il lui faut pourtant bien se rendre à l’évidence: pendant que Louis (Stefan Crepon), le cadet, poursuivait avec bonheur un parcours scolaire devant le conduire à la Sorbonne, Fus (Benjamin Voisin), son horizon de métallo bouché, se laissait séduire par le discours et la violence d’un groupuscule à l’idéologie nauséeuse – à l’opposé des valeurs humanistes toujours prônées par son père. Et ce dernier d’assister, impuissant, à la dérive de son fils, l’amour le disputant à l’incompréhension.

Adapté du roman Ce qu’il faut de nuit de Laurent Petitmangin, Jouer avec le feu voit les soeurs Delphine et Muriel Coulin (17 filles, Voir du pays) s’emparer d’une question brûlante: la tentation du repli identitaire dans un environnement en déshérence. Ce sujet politique, les réalisatrices choisissent de l’aborder par la voie de l’intime, se concentrant sur cette famille hantée par le fantôme de l’absente, monde sans femmes au sein duquel les liens vont se distendre au risque de la rupture. Portrait de famille débordant sur celui de la France et de l’époque – « le film aurait pu s’appeler « France 2024 », observent les cinéastes -, Jouer avec le feu souligne ses intentions à l’excès. Le propos n’en est pas moins fort, et puissamment incarné par son impeccable trio d’acteurs, Vincent Lindon en tête qui, dans un registre désormais familier, se montre à son habitude d’une remarquable justesse.

Jouer avec le feu

Drame de Delphine et Muriel Coulin. Avec Vincent Lindon, Benjamin Voisin, Stefan Crepon.

cote: 3/5

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