A 22 ans, Nejma (Oulaya Amamra) bosse dans une manade, un élevage de taureaux en semi-liberté, s’occupant des bêtes tout en s’entraînant en vue de la course camarguaise où il lui faudra défier un animal dans l’arène, seule raseteuse dans un monde d’hommes où règne un machisme décomplexé. « Tu t’en es bien tirée pour une fille », lui assène ainsi l’un de ses camarades, alors qu’on fête la jeune intrépide pour sa première réussie, la soirée, où l’alcool coule à flots, se terminant toutefois dans un trou noir dont elle émerge nauséeuse. Et de bientôt constater la mue progressive de ses sens et de son corps, alors qu’un taureau commence à semer la mort alentour, des battues s’organisant dans la foulée…
Trois ans après Fragile, une comédie romantique située sous le soleil de Sète, la réalisatrice franco-algérienne Emma Benestan s’attèle, pour son second long métrage, à un western qu’elle inscrit dans le paysage camarguais et un monde régi par des rituels immuables. Un choix judicieux, le récit puisant dans ce décor une coloration fantastique, sublimée par la photographie de Ruben Impens (le chef-op de Julia Ducournau et de Felix Van Groeningen), tandis que s’opère la métamorphose de Nejma. Soit un film de genre brassant des enjeux féministes forts, Emma Benestan donnant à sa vision des contours d’une fascinante étrangeté tandis que, en héroïne aux prises avec cet aréopage masculin, Oulaya Amamra vibre d’une intensité et d’une puissance rares.
Animal
Western fantastique de Emma Benestan. Avec Oulaya Amamra, Damien Rebattel.