Une petite ville irlandaise couleur grisaille, au milieu des années 80. C’est dans ce décor morne que l’on découvre Bill Furlong (Cillian Murphy), un marchand de charbon menant une existence paisible aux côtés de sa femme, Eileen (Eileen Walsh), et de leurs cinq filles. Un homme de peu de mots qui, alors que la bourgade est absorbée par les préparatifs de Noël, va être le témoin, à l’occasion d’une livraison au couvent local, de l’internement forcé d’une jeune fille « déposée » là par ses parents. Une scène poignante à la résonance douloureusement intime qui, ravivant un passé longtemps enfoui, va le laisser aux prises avec un dilemme moral : fermer les yeux et continuer sa vie comme si de rien n’était. Ou agir et s’exposer à l’opprobre d’une petite communauté soumise à la toute-puissance de l’Eglise catholique, incarnée avec une autorité glaçante par soeur Mary (Emily Watson).
Adapté du roman éponyme de Claire Keegan, Small Things Like These voit Tim Mielants (De Patrick, Nobody Has to Know) revenir sur le scandale des « blanchisseries Madeleine » en Irlande, institutions qui devaient, jusqu’en 1996, exploiter des milliers de « femmes perdues » ayant eu des relations sexuelles hors mariage, leur infligeant des traitements humiliants afin de les « rééduquer ». Un sujet que Peter Mullan évoquait frontalement dans The Magdalena Sisters, en 2002, et que le réalisateur belge choisit d’aborder par le biais de l’intime, dans un film d’une sombre et suffocante beauté. Mielants a le trait pudique, et son film est avant tout affaire de silences et de non-dits. Un registre dans lequel excelle un Cillian Murphy mutique et fourbu, et réussissant par la simple force de son regard à apporter une myriade de nuances aux tourments intérieurs de son personnage. D’une intensité contenue, sa composition illumine ce film délicat hantant durablement le spectateur.
Small Things Like These
Drame de Tim Mielants. Avec Cillian Murphy, Emily Watson, Eileen Walsh.
